Le pèlerinage chrétien
RENCONTRER LE SAUVEUR!
Le pèlerinage est un voyage chrétien (Lv 23,2: « saintes convocations« ) où l’on rencontre Dieu par les lieux, les personnes et les situations.
La Foi judéo-chrétienne s’appuie sur la venue de Dieu dans l’histoire: le pèlerinage est une retraite (cf. Mt 14,13) permettant de toucher au plus près l’histoire et la géographie du Salut. En particulier dans la « terre de sainteté » (Za 2,16), le croyant confronte le « document » (l’Ecriture sainte) avec le « monument » (les sites archéologiques et sanctuaires; cf. p. Lagrange).
Le pèlerinage chrétien ne contredit pas les vacances et en constitue même le mode le plus complet, impliquant non seulement le corps et la psuche mais aussi le coeur profond (cf. 1Th 5,23) du croyant. Le mot « vacances » vient de vacuum, « vide« : à chacun de choisir ce dont il désire se vider: des vacances chrétiennes impliquent de vider les préoccupations qui encombrent l’âme…
Gn 12,1: Dieu dit à Abraham: « Va vers toi! » [C’est-à-dire mets-toi aujourd’hui et chaque jour en chemin pour rencontrer Celui qui t’a créé, qui demeure en toi, et qui offre de te rendre heureux dans son Royaume dès cette vie: Jésus-Christ.]
« Quitte ta terre [pour le Ciel!], ta parenté (hébreu moledet) [pour la famille de Dieu -Ep 2,19], la maison de ton père [pour la demeure de Dieu] »…
Ps 63,2: Dieu, toi mon Dieu je te cherche dès l’aurore, mon âme a soif de toi, après toi languit ma chair, terre aride, altérée, sans eau. 3 Oui, au sanctuaire je t’ai contemplé, voyant ta puissance et ta gloire.
Jr 7,2-15 « Tiens-toi à la porte du Temple de YHWH, proclames-y cette parole et dis: Améliorez vos voies et vos œuvres… Quoi! Voler, tuer, commettre l’adultère, se parjurer puis venir se présenter devant moi en ce Temple qui porte mon Nom. [Je vous rejetterai de devant moi] ». Le Seigneur par la bouche de Jérémie rejette une conception magique du temple et du pèlerinage par lequel on s’y rendait, parce que le pèlerinage ne compte pour rien si l’on ne fait pas la volonté de Dieu.
Le Christ lui-même est venu comme en pèlerinage à ta rencontre pour te proposer le salut. Accepte d’aller à sa rencontre avec toute ta vie. Quand tu fais un pas vers Lui, il en fait cent vers toi (cf. Mc 10,30).
La Parole de Dieu enseigne que nous ne vivons ici-bas que pour le Ciel: cette existence présente n’est elle-même qu’un pèlerinage, un chemin d’exode: à l’image du peuple hébreu, tu as été délivré de l’esclavage en traversant les eaux de la Mer rouge au baptême (cf. Ex 12s), tu as reçu la Parole, Dieu te proposes sans cesse une Alliance avec Lui, tu passes à travers une succession de désolations et de consolations (épreuves et victoires), jusqu’à ton entrée dans la Terre de la Promesse.
Adam, qui selon la tradition fut créé au lieu de Jérusalem, fut conduit par Dieu au jardin d’Eden, avant de retourner à Jérusalem pour finir ses jours;
Noé marchait avec Dieu (Gn 6,9);
Abraham quitta la Mésopotamie pour la terre de Canaan;
Isaac marcha vers le mont Moriah pour s’offrir en sacrifice;
Jacob alla à Béthel (Gn 28,11s) et marcha vers le pays des fils de l’Orient (29,1);
Moïse marcha quarante ans avec les hébreux;
Elie marcha vers l’Horeb (1R 19);
La sainte Famille marcha entre Nazareth, la Judée et l’Egypte et « trois fois l’an pour être vu du Seigneur à Jérusalem » (Ex 23,17).
L’être humain, avant même d’être sédentaire (agriculteur ou citadin), est homo viator (Gabriel Marcel), c’est-à-dire homme sur la Voie, car le Christ est la Voie (Jn 14,6), et l’Eucharistie notre viatique, c’est-à-dire la nourriture pour le chemin vers la Vie.
Pour te soutenir dans cette marche, dans sa bonté Dieu a pourvu l’humanité en lieux de vrai repos, des Sanctuaires, dans lesquels le Ciel s’entrouvre et Dieu déverse ses grâces avec une surabondance particulière. Symboliquement, le Sanctuaire est le « Temple de Dieu« , le lieu où Il demeure et vient se donner aux hommes, et où en retour les êtres humains viennent Lui rendre le culte qui Lui est dû.
Le pèlerinage n’est donc pas du tourisme (simple divertissement et curiosité strictement humaine pour sortir des habitudes), mais un engagement de tout l’être et une quête authentique de Dieu.
Ph 3,20 Notre cité est dans les cieux
Jn 18,36 Mon Royaume n’est pas de ce monde.
He 13,14 Nous n’avons point ici-bas de cité permanente, mais nous cherchons celle qui est à venir.
1P 2,11 Nous somme des gens de passage et des étrangers(dispersion)
Ps 39,13 Je suis un immigré, un hôte comme tous mes pères.
Saint Grégoire de Nysse (+394): Le vrai pèlerinage est la conversion!
POURQUOI partir en pèlerinage? (8 raisons ou effets / objectifs à poursuivre)
Le pèlerinage fait avec le cœur dans un Sanctuaire est un moyen particulièrement efficace de rencontre personnelle avec Dieu et de croissance dans la Foi: Dieu conduit en pèlerinage vers la Jérusalem céleste et sauve:
1. Le Seigneur y grave Sa Parole dans les cœurs (Rm 10,17),
2. Il y apprend à prier et permet l’accueil de grâces particulières données par Dieu sanctifiant les lieux qu’Il visite.
Les images et les lieux nous imprègnent: on ne lit plus la bible de la même façon ni ne prie le sacrifice de la messe, le triduum, et les temps liturgiques.
3. Il constitue une opportunité excellente d’être sauvés par les Sacrements du Pardon et de l’Eucharistie
4. Le croyant qui coopère avec Dieu peut vivre d’importantes conversions, et ensuite en faire mémoire et les approfondir.
5. Le pèlerinage est d’autant plus efficace qu’il engage toutes les facultés de l’être humain (corporelles, psychiques -émotionnelles, relationnelles, intellectuelles-, et spirituelles) (1Th 5,23)
6. Il approfondit la Communion des saints dans l’Eglise une, fondée par le Christ et l’Esprit (Mt 18,20 « Quand 2 ou 3 sont réunis en mon Nom, je suis au milieu d’eux ») en faisant bénéficier les uns des autres des grâces reçues par chaque personne
7. Il affermit les liens humains, à l’intérieur des familles et entre communautés, ethnies, nations, races et groupes religieux, ce qui est fort opportun spécialement dans les derniers temps (cf. Ep 2,13.14).
8. Il constitue un talent reçu, un commencement, une responsabilité de cohérence et de témoignage.
LE PELERINAGE DEPASSE AINSI LE SIMPLE TOURISME:
Le touriste fait un ‘tour‘, un cercle pour revenir où il en était; le pèlerin se laisse transformer.
Le touriste vient pour voir; le pèlerin vient pour être.
Le touriste cherche souvent à « faire » le plus grand nombre d’expériences extérieures (« cette fois on a ‘fait’ l’Italie ») et ainsi les « cocher »; le pèlerin peut se réjouir aussi de ces expériences, mais cherche à se laisser transformer en profondeur: de même qu’en parcourant un passage biblique, il n’est pas dérangé de revenir en un même endroit, car la vérité n’est pas d’abord dans l’apparence matérielle, et le sens et le bonheur de cette existence ne se rencontrent pas en goûtant superficiellement au maximum de possibilités.
Le touriste s’imagine qu’il va s’enrichir voire se trouver lui-même en changeant de lieux, goûtant de l’extérieur de nouvelles cultures, expérimentant de nouvelles idées; le pèlerin devient lui-même en trouvant l’Autre, en rencontrant de manière toujours plus proche son Sauveur divin.
Le touriste cherche un miroir et fait un selfie où il se met en scène devant le monument comme faire-valoir; le pèlerin cherche un Autre, en confrontant le monument au Document (l’Ecriture) pour sa propre conversion.
Le touriste cherche l’affection d’autrui en envoyant dès qu’il peut dans le web le maximum d’images de lui-même; le pèlerin trouve toute l’affection à la Source, et la partage réellement, lorsqu’il reconnaît dans ce qu’il voit les traces du Créateur: il rencontre dans la réalité Celui qui l’a fait à son image.
Le touriste est intéressé par sa propre expérience d’un lieu où il ne fait que passer; le pèlerin est intéressé par le lieu lui-même (cf. Gn 22,3 et al.), où il attend d’être changé par la Présence de Dieu.
Le touriste visite pour la vue et éventuellement l’histoire et la culture; le pèlerin sait que la vue, l’histoire et la culture, dans leur extériorité, sont là parce qu’elles ont une raison d’être, une Cause, et montrent un Créateur et Sauveur (eg dans une cathédrale, pas seulement reflet d’une production humaine mais de l’aspiration pour Dieu).
Le touriste fait un tour autour d’un lieu, le pèlerin cherche à entrer dans un mystère, quelque chose d’essentiel.
Le touriste est séduit par le slogan commercial « Happiness is a journey, not a destination« ; le pèlerin [pour qui « the journey only exists because of the final Destination« ] cherche et trouve sa Finalité.
Le touriste est spectateur extérieur des cultures qu’il visite; le pèlerin est acteur dans la réalité des événements auxquels il participe (eg liturgies).
Le touriste assiste à ce que d’autres célèbrent; le pèlerin célèbre ce à quoi il participe.
Le touriste fuit l’ennui; le pèlerin va à la rencontre de Celui qui est le sens de sa vie.
Le touriste vit son voyage comme une suspension ou interruption du temps; le pèlerin le vit comme une transformation par sanctification.
Le touriste s’échappe d’une réalité; le pèlerin poursuit l’ultime Réalité, Dieu source de l’Etre (cf. Ac 17,28).
Le touriste multiplie les divertissements; le pèlerin se tourne vers Celui qui est l’unique centre de sa vie.
Le touriste enchaîne des occupations dont il se fait dépendant; le pèlerin est libéré de ses chaînes par l’Unique expérience nécessaire (cf. Lc 10,42).
Le touriste cherche à toujours changer de destinations, le pèlerin cherche à changer de cœur.
Le touriste visite d’abord pour son propre intérêt; le pèlerin se préoccupe du bien d’autrui au moins autant que du sien.
Le touriste accumule des milliers de photos et des souvenirs matériels de ce qu’il observe; le pèlerin peut prendre des photos pour sa mémoire sensible mais cherche d’abord à imprimer en lui-même (mémoire profonde) le Christ image du Dieu invisible (Col 3,15) et à se dépouiller du superflu pour entrer dans l’expérience la plus profonde, la perle fine ou le trésor du Royaume.
Le touriste achète pour entasser dans sa maison du monde; le pèlerin se détache pour se donner et remplir sa maison du ciel (il peut aussi acheter pour faire plaisir aux autres à son retour).
Le touriste investit son argent et ainsi reçoit ce qu’il veut; le pèlerin s’investit d’abord lui-même, et ainsi veut ce qu’il reçoit.
Le touriste consomme un produit de loisir et satisfait son désir; le pèlerin s’abandonne au désir de Dieu et reçoit de Lui.
Le touriste peut être frustré de ne jamais pouvoir couvrir tous les endroits « importants »; le pèlerin peut faire l’expérience de l’Absolu en tout lieu.
Le touriste vient avec ses défauts d’impatience, indifférence, jugement…; le pèlerin essaie de laisser derrière lui tous ses péchés.
Le touriste cherche à se relaxer en bas; le pèlerin cherche à se reposer en Dieu.
Le touriste cherche à se distraire; le pèlerin cherche à croire.
Le touriste reste un observateur vide; le pèlerin est un acteur comblé de sa rencontre avec Dieu.
Le touriste s’ouvre l’esprit; le pèlerin ouvre aussi son âme.
Le touriste connaît par le savoir; le pèlerin connaît par l’expérience personnelle.
Le touriste consolide son instruction; le pèlerin consolide sa Foi.
Le touriste cherche la culture; le pèlerin, au-delà de la culture, cherche la vie.
Le touriste cherche à être cultivé; le pèlerin cherche à être sauvé.
Le touriste est motivé par la distraction; le pèlerin est mu par l’Incarnation.
COMMENT
5 QUALITES du bon pèlerin:
– Simplicité: il accepte un confort et des repas parfois modestes, parce que sa priorité est de rechercher les réalités d’en haut (Col 3,1)
– Abandon à la Providence et Paix du coeur: imprévus, horaires…;
– Ouverture et patience envers toute autre personne, par charité et témoignage chrétien: autres pèlerins du groupe ou d’autres groupes, chrétiens du pays, membres des autres religions; par exemple s’il y a un retard de transport: il n’y pas de problème de curiosité en plus à satisfaire et accumuler, mais qu’est-ce que Dieu me dit à travers cet événement?
– Entraide et responsabilité envers tout le groupe: notamment pour éviter tout retard; prière aussi pour les intentions des autres pèlerins;
– Intériorité: vs distractions, bruit et agitations dans des lieux très fréquentés;
Théocentrisme: recherche de la Présence et du message de Dieu plutôt que préoccupations touristiques.
SE PREPARER BIEN AVANT
Le pèlerinage implique de quitter pour quelques jours maison, famille, amis, travail, et habitudes, d’investir un peu de temps et d’argent, et de vivre certaines fatigues.
Pour que tout cet effort valle la peine et que tu en profites pleinement, nous t’invitons maintenant à préciser clairement tes idées, en définissant bien ta démarche; afin de te préparer et que ton pèlerinage ait la plus grande densité! Si tu le veux, ouvre ton intelligence et ton cœur en profondeur:
7 questions à se poser pour clarifier les raisons personnelles de ce pèlerinage:
– Qui viens-tu rencontrer?
– Quelles sont dans ta vie les principales joies, peines ou aspirations qui te poussent à aller t’adresser ainsi à Dieu?
– A quel moment de ta vie as-tu pris la décision de faire ce pèlerinage?
– Es-tu prêt à être honnête avec toi-même, les autres et Dieu, pour écouter ta conscience, au moins pendant ce pèlerinage?
– Ta conscience t’indique-t-elle des décisions de changement que tu dois prendre dans ta vie? (ou: Si tu devais aller au Ciel ce soir-même, que voudrais-tu être heureux de présenter à Jésus?)
– Que souhaites-tu vivre avec les autres?
– Quelles grâces as-tu à demander à Dieu?
4 ATTITUDES recommandées pour chaque lieu saint:
– anticiper en s’informant;
– approcher avec l’esprit et le cœur en attente;
– accueillir la présence et la grâce de Dieu sur place;
– faire mémoire après.